Que faut-il retenir du plan national de prévention et de lutte contre la maladie à virus Ebola ?

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Le plan national de lutte contre la maladie à virus Ebola (MVE) vient d’être publié par le SGDSN (Secrétariat général de la défense et de la sécurité nationale). Ce plan s’adresse à tous les organismes et professionnels pouvant se trouver impliqués, mais également au grand public. Nous en présentons ici les grandes lignes et les orientations.

Ce plan est diffusé alors que l’épidémie qui a commencé en Afrique de l’Ouest au mois de mars 2014 n’est toujours pas enrayée. Elle continue de progresser en Guinée, en Sierra Leone et au Liberia ; des cas importés dans différents pays, dont le Nigéria, la Côte d’Ivoire, l’Espagne, les Etats-Unis, la France et l’Inde, ont pu être à l’origine de transmissions locales, restées la plupart du temps limitées. Au Mali, de nombreux cas contacts sont encore en observation. Une autre épidémie, déclarée en République Démocratique du Congo, semble à présent sous contrôle.

Le plan a pour objectif la préparation du pays à l’arrivée possible de personnes infectées par le virus, nécessitant des soins appropriés et susceptibles de transmettre la maladie à l’occasion de contacts ou de soins. Il vise à protéger notre population, en métropole comme dans les territoires d’outre-mer, et tous les ressortissants français vivant dans des pays étrangers, et à limiter les conséquences sanitaires mais aussi socio-économiques de la propagation du virus et des craintes qu’elle peut susciter. Le plan a été élaboré par un travail conjoint des ministères chargés de la santé, de l’intérieur, des affaires étrangères, de la défense, de la recherche, de la justice, du travail et des transports, ainsi que du service d’information du gouvernement, coordonné par le SGDSN. Il s’adresse en priorité aux autorités publiques, nationales et locales, et plus largement, à toute personne pouvant exercer des responsabilités dans la prise en charge de la MVE, notamment les professionnels de santé. Il est accessible au grand public afin de l’informer sur le risque et les mesures de prévention, et d’atténuer les effets possibles de la peur de la maladie.

Il est rappelé que les crises du type de celle qui découle de l’épidémie sont marquées par une forte incertitude et de nombreuses inconnues qui peuvent obliger à des adaptations des mesures envisagées. Le plan constitue toutefois la « partie fixe du dispositif », identifiant les moyens et responsabilités qui sont sollicités. Il est présenté en deux parties. La première présente le cadre général de la préparation et de la réponse ainsi que les stratégies qui pourront être appliquées. La seconde est un ensemble de fiches décrivant de façon pratique les mesures à mettre en œuvre.

Après un rappel sur la maladie provoquée par le virus Ebola, la première partie en décrit les conséquences possibles. Celles-ci sont de nature sanitaire, mais aussi socio-économique : la maladie elle-même et la peur qu’elle suscite, souvent excessive et irrationnelle, peuvent désorganiser les systèmes de soin et au-delà, des secteurs économiques cruciaux. Le plan vise donc à limiter, entre autres et autant que possible, la surcharge injustifiée du système de santé ou du dispositif hospitalier, la paralysie des transports et des services de secours, le recours excessif au « droit de retrait ». La présentation de quelques scénarios possibles en montre toutefois les limites : le cas de personnes arrivées clandestinement dans des foyers ou des communautés de sans abris et entrées en contact avec d’autres personnes difficiles à identifier et retrouver « constituerait une difficulté ». Le plan fera donc l’objet d’une actualisation régulière, prenant en compte des scénarios définis par le HCSP (Haut conseil de la santé publique), dont un scénario « majorant ».

Trois situations possibles ont été prises en compte pour l’élaboration du plan :

  • Situation 1 : absence sur le sol national de cas de MVE non encore pris en charge. Les mesures visent alors à limiter l’introduction du virus sur le territoire, en particulier par le contrôle sanitaire aux frontières, suivi d’une prise en charge des cas détectés.
  • Situation 2 : présence sur le territoire d’un cas non contrôlé ou d’un cas autochtone. Il s’agit alors de limiter la propagation du virus, qui peut s’effectuer selon les différents scénarios envisagés précédemment. Après une réponse initiale, une montée en puissance du système peut être nécessaire.
  • Situation 3 : contamination de ressortissants français ou binationaux dans les pays où se déroule l’épidémie. Le risque augmente avec la multiplication des foyers épidémiques, et le nombre de cas à prendre en charge pourrait devenir élevé.

La mise en place et la coordination de la réponse aux différentes situations sont sous la responsabilité d’une organisation gouvernementale de conduite de la crise (dirigée par le premier ministre, s’appuyant sur le SGDSN et la Cellule interministérielle de crise, CIC), d’organisations zonale (impliquant le préfet de zone et l’Agence régionale de santé, ou ARS) et départementale (préfet, délégation territoriale de l’ARS). A chaque niveau d’organisation correspondent des interactions et des acteurs nombreux, nationaux (services de secours et de police, SAMU, justice, éducation nationale, commandant de zone de défense, opérateurs de transports, conseils généraux et départementaux, maires) ou internationaux (Organisation mondiale de la santé, dispositif de l’Union Européenne et centres de crise des gouvernements étrangers pour le niveau gouvernemental).

Aux situations susceptibles d’être rencontrées, le plan oppose une stratégie de réponse plurisectorielle destinée à faire face aux différentes conséquences possibles : sanitaires, mais aussi sociétales et économiques. Des mesures concernent la continuité des activités, l’action à l’international, la communication, les aspects éthiques. Ces derniers sont mis en avant dans la nécessité de garantir à tous une prise en charge de même niveau, la priorisation, parfois inévitable, de l’accès à certaines ressources (en faveur des professionnels contaminés alors qu’ils agissaient au service des malades), le respect nécessaire des mesures d’isolement, le rejet de toute stigmatisation.

La stratégie sanitaire s’appuie sur un réseau de surveillance et d’alerte (Institut de veille sanitaire, SAMU, ARS, Centre d'épidémiologie et de santé publique des armées, professionnels et établissements de santé), un dispositif de diagnostic centré sur le Centre national de référence des fièvres hémorragiques virales de Lyon, un réseau de 13 établissements de santé de référence habilités (ESRH) disposant des moyens et de la formation nécessaires pour l’accueil des malades (12 établissements en métropole, 1 à La Réunion ; un autre établissement est en cours d’habilitation pour la région Antilles-Guyane). Des équipements de protection ont été approvisionnés par l’Établissement de préparation et de réponse aux urgences sanitaires (EPRUS), afin de pouvoir être mis à disposition des ESRH mais aussi d’autres établissements ou professionnels, dont ceux assurant le rapatriement et le transport de cas suspects et les services funéraires. L’information des professionnels de santé et assimilés est basée sur un système redondant : message rapides d’alerte sanitaire (MARS), information diffusée par les SAMU et sociétés savantes sur leurs sites internet, liste de diffusion « DGS-Urgent », recommandations du HCSP, fiches de recommandations de la Caisse primaire d'assurance maladie, des conseils ordinaux, des établissements de santé.

Le plan indique des priorités en matière de recherche. Celles-ci vont d’abord à des recherches opérationnelles visant à améliorer la prise en charge thérapeutique des malades. Elles porteront sur des approches expérimentales qui ont déjà produit des résultats prometteurs, comme certains vaccins ou molécules antivirales ; les moyens de diagnostic seront également améliorés, pour une mise en œuvre plus simple, plus rapide et plus sûre. Des recherches plus fondamentales seront développées dans le moyen terme (vaccins, nouvelles cibles thérapeutiques, évolution des mutations du virus, analyse des survivants).

Concernant les ressortissants français présents dans les pays où sévit l’épidémie, plusieurs options sont présentées. En fonction de l’évolution de la situation, des incitations à quitter le pays, de préférence de façon échelonnée et par vols commerciaux, pourront être lancées. Des rapatriements seront assurés de façon prioritaire pour des professionnels infectés dans le cadre de leurs activités d’aide aux populations locales ; ils seront décidés au cas par cas pour les autres ressortissants, éventuellement susceptibles d’être pris en charge sur place.

Pour s’informer en détail du contenu et du déroulement des mesures envisagées dans les différents domaines, les lecteurs sont invités à se reporter aux fiches qui composent la deuxième partie du document.

Référence

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