Toutes les nouveautés concernant les recommandations sanitaires 2011 pour les voyageurs

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Les nouvelles recommandations sanitaires 2011 pour les voyageurs, élaborées par le Comité des maladies liées aux voyages et des maladies d'importation (CMVI) ont été récemment publiées sous la forme d'un avis du Haut Conseil de la santé publique dans le Bulletin épidémiologique hebdomadaire (BEH), la revue de l'Institut de veille sanitaire (InVS). Les modifications apportées dans ces nouvelles recommandations par rapport à celles publiées en 2010sont détaillées ici.

1. Vaccinations

1.1. Rougeole

La vaccination contre la rougeole était auparavant recommandée pour les adultes nés en 1965 ou après, n'ayant pas d'antécédent certain de rougeole ou de vaccination, se rendant dans des pays de forte endémie. Cette recommandation a été supprimée. Il s'agit désormais de s'assurer que chaque voyageur a bien reçu deux doses du vaccin trivalent contre la rougeole, la rubéole et les oreillons (RRO). Il demeure néanmoins une particularité pour les nourrissons qui doivent voyager dans les pays de l'ancien monde, y compris en Europe : étant donné les poussées épidémiques actuelles, cette vaccination peut être pratiquée avec une dose de vaccin rougeoleux monovalent entre les âges de 6 et 8 mois. Les enfants ayant reçu le vaccin rougeoleux monovalent devront recevoir ultérieurement les deux doses de vaccin RRO, conformément au calendrier vaccinal.

1.2. Encéphalite japonaise

Il est précisé dans ces nouvelles recommandaitons que le vaccin disponible en France n'est à ce jour recommandé que chez l'adulte (à partir de l'âge de 18 ans), en l'absence de données de tolérance et d'efficacité chez les enfants et adolescents. Ce vaccin est disponible uniquement dans les centres agréés de vaccinations internationales. Le schéma vaccinal a été complété avec les nouvelles données disponibles : deux injections sont administrées à J0 et à J28, avec un rappel à 12-24 mois après la primo-vaccination.

1.3. Encéphalite à tiques

Cette vaccination est recommandée pour tous les voyageurs séjournant en zone rurale ou forestière, du printemps à l'automne, dans des zones d'endémie pour l'encéphalite à tiques qui ont été précisées : Europe centrale, orientale et septentrionale, mais aussi le nord de l'Asie centrale, le nord de la Chine et le nord du Japon.

1.4. Fièvre jaune

L'Organisation mondiale de la santé (OMS) a mis en ligne le 6 mai 2011 sur son site internet l'édition 2011 de sa publication annuelle "Voyages internationaux et santé". Les mises à jour correspondantes ont été publiées par le Haut Conseil de la santé publique dans un addendum publié postérieurement à l'article du BEH. Dans les zones où le risque d'exposition à l'infection est très faible, la vaccination n'est, en général, pas recommandée, sauf en cas de séjour prolongé, de lourde exposition aux piqûres de moustiques, ou d'impossibilité d'éviter ces piqûres. Ces recommandations sont prises en compte par l'outil de recommandations personnalisées de MedecineDesVoyages.net.

D'une manière générale, lorsque la vaccination ne peut pas être réalisée, les voyages en zone d'endémicité amarile sont formellement déconseillés.De nouveaux points concernent les précautions à prendre avant de vacciner un voyageur contre la fièvre jaune.

La vaccination des femmes allaitantes est possible mais, en raison du passage dans le lait du virus vaccinal, l'allaitement doit être suspendu pendant la phase de virémie postvaccinale ; il peut être repris deux semaines après l'administration du vaccin. Cette précaution a fait l'objet d'une nouvelle détaillée sur MesVaccins.net.

Le don de sang doit être suspendu pendant la phase de virémie post-vaccinale ; il peut être repris quatre semaines après l'administration du vaccin.

Dans les cas de thymectomie ou d'irradiation du thymus, deux situations différentes doivent être distinguées. Si ces interventions étaient motivées par un dysfonctionnement du thymus, la contre-indication au vaccin amaril est définitive. En revanche, les personnes dont le thymus a été irradié indirectement lors du traitement d'une autre maladie (en particulier un cancer du sein), peuvent être vaccinées contre la fièvre jaune. Il s'agit d'une recommandation de l'Advisory Committee on Immunization Practices (ACIP) aux Etats-Unis.

En cas d'infection à VIH, la vaccination est contre-indiquée si la numération des lymphocytes CD4 est inférieure à 200 par mm3.

Il faut rappeler que la situation est différente pour le vaccin BCG, qui est contre-indiqué chez la personne infectée par le VIH quelle que soit la valeur de la numération des CD4 (cette observation a d'ailleurs fait l'objet d'un erratum publié dans le BEH).

2. Paludisme

Les données concernant le paludisme d'importation ont été actualisées : le nombre de cas a été estimé à environ 4 600 en 2010 pour l'ensemble de la France métropolitaine, soit une augmentation d'environ 7,5 % par rapport à 2009. Les pays où a eu lieu la contamination sont majoritairement situés en Afrique subsaharienne (91 %). L'espèce du parasite en cause est Plasmodium falciparum dans 86 % des cas. Les formes graves représentent 7,4 % des cas de paludisme importés. En 2010, huit décès ont été rapportés. Environ trois quarts des cas sont survenus chez des sujets d'origine africaine résidant en France ou arrivant d'Afrique. Cette population semble moins bien informée du risque de paludisme grave et des mesures de prévention nécessaires, ou pourrait être dissuadée par leur coût. Les données sur l'évolution des chimiorésistances aux antipaludiques en 2010 confirment les recommandations émises en 2008. De rares cas de chimiorésistance à la méfloquine (Lariam®) et à l'association atovaquone-proguanil (Malarone®) ont été rapportés.

Les capacités financières du voyageur sont un critère qui a été ajouté à la liste des éléments à prendre en compte pour proposer une chimioprophylaxie avant un séjour en zone d'endémie du paludisme.

De rares cas de paludisme dus à un parasite du singe, Plasmodium knowlesi, ont été identifiés depuis 2008 chez des voyageurs en Europe (4 dont 1 en France), en Australie et aux Etats-unis.

La situation du paludisme selon le pays a été actualisée. Après les Émirats Arabes Unis en 2007, le Maroc et le Turkménistan ont été déclarés indemnes de paludisme par l'OMS en 2010. La chimioprophylaxie est donc inutile dans ces pays. À l'inverse, dans certaines villes d'Inde et d'Amazonie, le paludisme est redevenu endémique. Ces modifications épidémiologiques sont prises en compte en temps réel par le système expert de MedecineDesVoyages.net.

D'autres mises à jour concernent les produits médicamenteux utilisés pour la chimiprophylaxie antipaludique. L'apparition sous traitement par méfloquine de troubles neuropsychiques doit conduire non seulement à l'interruption immédiate de ce traitement prophylactique mais aussi à une consultation médicale. Le voyageur doit être informé au préalable de la survenue possible de ces effets indésirables. Une autre molécule utilisable pour la prévention du paludisme est la doxycycline, dont il existe plusieurs formes : le monohydrate de doxycycline (Doxypalu® en comprimés à 50 ou 100 mg, Granudoxy® Gé en comprimés sécables à 100 mg) et l'hyclate de doxycycline (Doxy® 100 Gé et Doxy® 50 Gé comprimés).

Un traitement antipaludique sans avis médical pendant le séjour (traitement présomptif) doit rester l'exception et ne s'impose qu'en l'absence de possibilité de prise en charge médicale dans les 12 heures suivant l'apparition de la fièvre. Dans ce cadre, le Haut Conseil de la santé publique insiste sur la nécessité d'informer les voyageurs au sujet des risques liés à l'achat de spécialités hors de France, en raison du grand nombre de contrefaçons circulant dans les pays en développement, et des risques liés à l'achat de médicaments sur Internet, dont ni l'origine, ni la composition ne sont garantis.

3. Les risques liés aux arthropodes

Dans les habitations, la climatisation diminue les risques de piqûres, et des insecticides en bombes ou en diffuseurs électriques pourront être utilisés en mesure d'appoint. Dans les pièces aérées et les vérandas, les serpentins fumigènes peuvent être des répulsifs efficaces. De plus, il est maintenant au contraire fortement recommandé de ne pas recourir à certaines méthodes inefficaces, telles que l'utilisation de bracelets anti-insectes pour se protéger des moustiques et des tiques ou d'appareils sonores à ultrasons. La vitamine B1, l'homéopathie, les raquettes électriques, les rubans, papiers et autocollants gluants sans insecticide sont également déconseillés. Ces précisions sont extraites des recommandations 17 et 18 du texte « Protection personnelle anti-vectorielle » préparé sous l'égide de la Société de médecine des voyages et de la Société française de parasitologie (version du 29/09/2010).

Un encadré sur les répulsifs cutanés a été ajouté. Dans la stratégie de protection contre les vecteurs, les répulsifs sont en effet un complément à la tenue vestimentaire, à l'utilisation de la moustiquaire et à l'entretien péridomiciliaire (c'est-à-dire autour des maisons) contre les gîtes. Ils sont composés d'une substance active qui éloigne les insectes sans les tuer et sont appliqués sur toutes les parties du corps non couvertes. La durée de la protection varie de 4 à 8 heures selon la nature et la concentration de la substance active ainsi que des conditions d'utilisation (sudation, température et humidité ambiantes, usage concomitant d'une crème solaire…). L'application doit être renouvelée après une baignade. Ces produits sont à employer avec précaution ; ils ne doivent pas être ingérés, ni appliqués sur les muqueuses ou sur des lésions cutanées étendues. Chez l'enfant et la femme enceinte, leur utilisation doit respecter un mode d'emploi précis. Chez la femme allaitante, leur utilisation est possible en respectant les mêmes précautions et en veillant à la non application au niveau du sein ainsi qu'au lavage des mains avant la mise au sein.

D'autres révisions concernent le tableau sur l'efficacité des moyens de prévention. Ainsi, l'efficacité de la pulvérisation intra-domiciliaire d'insecticides rémanents (méthode réservée aux professionnels de la lutte anti-vectorielle, indépendante et non disponible pour les voyageurs) a été révisée à la hausse pour les moustiques du genre Aedes.

Le tableau sur les concentrations des substances actives entrant dans la composition des répulsifs corporels jugés efficaces en fonction des tranches d'âges a lui aussi été actualisé pour prendre en compte les travaux organisés par la Société de médecine des voyages et la Société française de parasitologie.

En dehors des recommandations d'utilisation des répulsifs cutanés dans les zones à risque de maladies graves à transmission vectorielle, l'Agence française de sécurité sanitaire (Afssaps) précise qu'au vu des résultats des évaluations européennes en cours concernant les substances répulsives, l'usage de l'IR3535 est à privilégier chez les jeunes enfants et les femmes enceintes.

Les recommandations d'utilisation des répulsifs sont prises en compte par le système expert de MedecineDesVoyages.net.

Parmi les insectes piqueurs autres que les moustiques, les phlébotomes peuvent transmettre la leishmaniose mais aussi des arbovirus dans les régions suivantes : Amérique centrale et Amérique du sud, Asie centrale et Asie du sud, pourtour méditerranéen.

4. Diarrhées

Les microorganismes à l'origine de la diarrhée du voyageur ou tourista ont été détaillés. Ce sont des virus (rotavirus, norovirus…), des bactéries (Escherichia coli entérotoxinogène, salmonelles non typhoïdiques, Shigella spp, Campylobacter spp, Yersinia enterocolitica, exceptionnellement Vibrio cholerae) ou parasitaires (Giardia intestinalis, Cryptosporidium spp, Isospora belli, Cyclospora cayetanensis, Entamoeba histolytica).

D'autres précisions concernent les modalités thérapeutiques. Les formes légères peuvent être atténuées par la prise d'un antidiarrhéique antisécrétoire, le racecadotril. Il est précisé que ce produit est contre-indiqué chez la femme qui allaite. Les contre-indications des antidiarrhéiques moteurs ont été précisées.

Pour les formes cliniques moyennes ou sévères, les antibiotiques utilisables sont l'azithromycine en cas de séjour en Asie ou pour les enfants atteints de formes peu sévères, et les fluoroquinolones pour les adultes en dehors de l'Asie ou pour les enfants présentant une forme sévère (dans ce cas, la ciprofloxacine doit être préférée).

5. Risques accidentels

Les accidents (de la circulation ou non) représentent une des principales causes de rapatriement sanitaire. Le port de la ceinture de sécurité reste indispensable ainsi que celui du casque si l'on circule à deux-roues. Il faut éviter de conduire soi-même (prendre un chauffeur) et ne pas rouler de nuit.

6. Risques liés aux excursions et randonnées en altitude

La limite de l'altitude à partir de laquelle le risque est considéré comme significatif a été ramenée à 2 500 mètres au lieu de 3 000 mètres auparavant. De plus, le traitement préventif du mal d'altitude a été mis à jour. Ce traitement doit être commencé deux jours avant l'arrivée en haute altitude et poursuivi pendant deux jours après avoir atteint le point culminant. Plusieurs médicaments sont maintenant proposés : l'acétazolamide (Diamox®), administré en deux prises quotidiennes de 125 mg en l'absence de contre-indication aux sulfamides, ou la dexaméthasone (4 mg deux fois par jour), voire, hors AMM, en particulier pour la prévention de l'oedème pulmonaire, la nifédipine (Adalate®)a.

a Luks AM, McIntosh SE, Grissom CK, Auerbach PS, Rodway GW, Schoene RB, et al. Wilderness Medical Societyp Wilderness Medical Society consensus guidelines for the prevention and treatment of acute altitude illness. Wilderness Environ Med. 2010 ;21(2):146-55. Erratum in: Wilderness Environ Med. 2010;21(4):386.

Source : Bulletin épidémiologique hebdomadaire.

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