Organisation mondiale de la santé : rapport sur le paludisme 2017

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Comme chaque dernier année au quatrième trimestre de l'année, l'Organisation mondiale de la santé a publié le Rapport sur le Paludisme.

A. Les données présentées dans le rapport mis en ligne le 29 novembre 2017 portent sur l'année précédente :

A la croisée des chemins dans la lutte contre le paludisme, les auteurs du rapport insistent sur la nécessité de poursuivre et d'augmenter les investissements en matière de lutte contre le paludisme. Ils précisent que l'investissement global a été de 2,7 milliards de US$ en 2016 et que les pays d'endémies ont contribué à 31 % de cet investissement. Cette somme importante est cependant loin de l'évaluation des besoins pour atteindre les objectifs intermédiaires adoptés par l'Assemblée mondiale de la Santé en mai 2015 dans la Stratégie technique mondiale de lutte contre le paludisme 2016-2030.

Quelques chiffres montrent l'ampleur des actions menées. Ainsi ont été livrés :

  • entre 2014 et 2016, 582 millions de moustiquaires imprégnées, dont 501 millions pour la région Afrique ;
  • en 2016, 312 millions de tests diagnostique rapide dont 269 millions pour la région Afrique ;
  • en 2016, 409 millions de traitement par combinaison thérapeutique à base d'artémisine, dont 91% pour la région Afrique.

Toutefois le chemin reste encore long :

  • Plusieurs enquêtes portant sur le recours aux soins et la mise en place d'une prise en charge intégrée des cas dans la communauté (PEC‑C) favorisant ainsi la gestion intégrée des causes de mortalité infantile (paludisme, pneumonie et diarrhée) au niveau des établissements de santé et de la communauté sont présentées. 26 pays d'endémie palustre ont développé une telle stratégie, 24 d'entre eux ont commencé à la mettre en place et les premières enquêtes montrent un taux de sollicitation des soins en cas de fièvre plus important.
  • Le système de surveillance du paludisme montre une grande hétérogénéité selon les pays, même dans certains des pays où le paludisme représente une charge importante.
  • Un chiffre résume cependant la situation financière. Dans l'ensemble des 41 pays où le paludisme sévit le plus, le financement par personne à risque reste en deçà de 2 dollars US
  • Ces besoins et ce bilan du paludisme sont à mettre en parallèle avec l'évolution épidémiologique présentée dans ce rapport 2017

Au niveau mondial, le nombre de cas de paludisme est estimé à 216 millions en 2016 (intervalle de confiance de 95 % : 196-263 millions), contre 237 millions en 2010 (intervalle de confiance de 95 % : 218-278 millions) et 211 millions en 2015 (intervalle de confiance de 95 %: 192-257 millions).

B.Dans les annexes du rapport on retrouve les chiffres clés concernant le paludisme, région par région.

1. Pour l'Afrique de l'Ouest :

Trois cent soixante sept millions de personnes vivent dans 17 pays à haut risque de paludisme.Plasmodium falciparum est impliqué dans 99% des accès, la transmission présente une forte saisonnalité dans les pays sahéliens. Dans la sous-région, le nombre estimé d'accès palustre a été de 111 millions pour 41 millions de cas confirmés. Près de 19 000 décès ont été rattachés à un accès palustre.

Quatorze pays de la région ont vu leur nombre de cas augmenter en 2016.

2. Pour l'Afrique centrale :

168 millions de personnes vivent dans 10 pays à haut risque de paludisme. Plasmodium falciparum est impliqué dans 99% des accès, la transmission est pérenne au long de l'année sauf au Burundi, au Cameroun, au Nord du Tchad et sur les Hauts Plateaux à l'Est du Congo. Dans la sous-région, le nombre estimé d'accès palustre a été de 38 millions pour 32 millions de cas confirmés. Près de 6 000 décès ont été rattachés à un accès palustre. La République Démocratique du Congo a rapporté 48 % des cas estimés, le Burundi 26 % et l'Angola 12 %.

3. Pour l'Afrique de l'Est et l'Afrique du Sud.

Trois cent quatre vingt quinze millions de personnes vivent dans 11 pays à haut risque de paludisme. Plasmodium falciparum est impliqué dans 99% des accès sauf en Éthiopie où Plasmodium vivax est observé.

La transmission est pérenne au long de l'année dans quasiment tout le Malawi, le Mozambique, le Sud Soudan, l'Ouganda, la République de Tanzanie et la Zambie.

Elle présente une forte saisonnalité en Éthiopie, à Madagascar, au Zimbabwe et sur la côte et les Hauts Plateaux kényans.

Dans la sous-région, le nombre estimé d'accès palustre a été de 46 millions pour 42 millions de cas confirmés. Près de 21 000 décès ont été rattachés à un accès palustre. Le Mozambique, l'Ouganda et la République de Tanzanie ont rapporté plus de 50% des cas estimés.

Dans cette sous-région un profil particulier correspond aux pays où la transmission est à faible risque, elle recouvre 15,7 millions de personnes dans 6 pays (Érythrée, Namibie, Swaziland, Botswana, Afrique du Sud, Comores). La transmission y est focale, impliquant principalement Plasmodium falciparum, sauf en Érythrée, et la saisonnalité est très marquée. Dans ces pays, le nombre estimé d'accès palustre a été de 126 000 pour 56 000 cas confirmés. Seuls 126 décès ont été rattachés à un accès palustre.

4. Pour l'Amérique

Cent vingt six millions de personnes vivent dans 11 pays à haut risque de paludisme. Plasmodium falciparum est impliqué dans 27% des accès, Plasmodium vivax dans 69% et les autres espèces plasmodiales dans 4%.

Des 18 pays de la zone, 12 ont pour objectif une réduction de l'incidence supérieure à 40% d'ici 2020. Toutefois, le Brésil et le Venezuela ont noté une augmentation de 20% de l'incidence entre 2010 et 2016. Globalement la sous-région a vu une augmentation de l'incidence du paludisme, elle est rapportée pour l'essentiel à quelques épidémies focales et à une augmentation de la surveillance.

5. Pour la région de la Méditerranée orientale :

Trois cent un millions de personnes vivent dans une zone à risque de paludisme. Quatorze pays sont déclarés indemnes de transmission de paludisme et travaillent à éviter sa réintroduction. Huit pays restent endémiques. Le nombre estimé d'accès palustre a été de 3,6 millions, le nombre de cas confirmé de 1,23 millions.

6. Pour la région d'Asie du Sud Est

(comprenant l'Inde mais ni le Vietnam, le Laos et la Malaisie)

Un milliard 350 millions de personnes vivent dans 9 pays à risque de paludisme sur les 11 constituant la région. Plasmodium falciparum est impliqué dans 63 % des accès, Plasmodium vivax 35 % et les autres espèces plasmodiales 2 %. L'Inde et l'Indonésie déclarent respectivement 80 % et 16 % des cas et 60 % et 30 % des décès liés au paludisme.

En valeur absolue, les décès liés au paludisme sont passés de 1403 en 2010 à 557 en 2016 soit une réduction de 60 %.

7. Pour la région Ouest Pacifique

Sept cent douze millions de personnes vivent dans 10 pays à risque de paludisme. Plasmodium falciparum est impliqué dans 39 % des accès, Plasmodium vivax 26 % et les autres espèces plasmodiales 35 %. La Papouasie Nouvelle Guinée et les Îles Salomon ont rapportés 92 % des cas de paludisme déclarés dans la sous-région. Sept des pays de la sous-région sont en voie d'atteindre l'objectif de réduction de 40 % de l'incidence.

8. Pour la sous-région Europe

La transmission autochtone du paludisme a été interrompue en 2015. Dix pays ont développé un programme de surveillance de la réintroduction du paludisme. Les données du paludisme d'importation observé en Europe sont présentées, la France reste le pays non impaludé ayant déclaré le plus de paludisme d'importation (2500 soit 30% des cas). 80 % des patients ayant présentés un accès palustre en Europe avait été contaminé en Afrique, 15 % dans la sous-région Méditerranée, 2 % en Asie, 1 % en Amérique et 0 % dans la région Ouest Pacifique.

En 2016 seuls deux pays ont été certifiés exempts de paludisme par l'OMS : le Kirghizistan et le Sri Lanka.

C. Enfin, les rapporteurs de l'Organisation mondiale de la santé ont sérié les principales problématiques interférant avec l'avancée de la lutte contre le paludisme :

  • le manque de financements nationaux et internationaux durables et prévisibles ;
  • les risques liés aux conflits dans les zones d'endémie, les schémas climatiques anormaux ;
  • l'émergence de la résistance du parasite aux médicaments antipaludiques ;
  • la résistance du moustique aux insecticides.

De plus, le rapport 2017 évoque pour la première fois l'extension dans certaines zones de souches de Plasmodium falciparum défectives en protéine riche en histidine 2 (HRP2). Ces souches ne sont donc pas dépistées avec les tests de diagnostic rapide (TDR) simple. Même si la prévalence de la suppression du gène HRP2 reste faible dans la plupart des zones à forte transmission, un renforcement du suivi est nécessaire afin d'adapter au plus vite la stratégie diagnostique.

Dans la continuité du rapport 2016, l'évolution des résistances aux combinaisons thérapeutiques à base d'artémisinine (ACT) est évoquée. Les ACT ayant un rôle important dans le succès de la lutte contre le paludisme au niveau mondial.

Même si la multirésistance, qui inclut la résistance (partielle) aux artémisinines et aux médicaments partenaires, a été détectée dans 5 pays de la sous-région du Grand Mékong, on a pu observer une réduction massive du nombre de cas de paludisme et de décès associés dans cette sous-région. La surveillance de l'efficacité des médicaments antipaludiques a permis une mise à jour rapide des politiques de traitement dans la sous-région.

En Afrique, aucune résistance (partielle) aux artémisinines n'a été rapportée à ce jour, et les ACT de première ligne restent efficaces dans toutes les zones d'endémie palustre.

La résistance aux pyréthrinoïdes, la seule classe d'insecticides actuellement utilisés, est étendue. Toutefois, les moustiquaires imprégnées restent efficaces pour la prévention du paludisme, même dans les zones où les moustiques ont développé une résistance aux pyréthrynoïdes. Il s'agit là du résultat d'une large évaluation coordonnée par l'OMS dans plusieurs pays entre 2011 et 2016, et n'ayant établi d'association entre poids du paludisme et résistance aux pyréthrinoïdes sur aucun site d'essai dans 5 pays.

Source : Organisation mondiale de la santé.